dimanche 26 octobre 2008

Défense de se taire .

UNION SYNDICALE SOLIDAIRES
FONCTIONS PUBLIQUES ET ASSIMILES
Prime de Fonctions et de Résultats : Un classement inacceptable des fonctionnaires sur une échelle de 0 à 6

En France, il existe une fonction publique, divisée en trois versants : la fonction publique d’Etat, la fonction publique hospitalière et la fonction publique territoriale. Une réforme brutale de la fonction publique est engagée par le gouvernement actuel et un « livre blanc » sur l’avenir de la fonction publique a été rédigé, en ce sens, par Jean-Ludovic Silicani et publié en avril 2008. Le gouvernement, dans la droite ligne de sa politique de régression sociale, entend mettre en oeuvre rapidement les recommandations de ce rapport.
Dans la logique du travail de sape commencé sous le précédent gouvernement en 2004 avec le rapport Dutreil, dans la continuité du projet de loi « sur la mobilité » des fonctionnaires, de la RGPP et de la réorganisation territoriale de l’Etat, c’est la destruction de la Fonction publique qui s’annonce.
C’est le 17 octobre qu’étaient conviées les fédérations de fonctionnaires à une réunion de présentation de la PFR - prime de fonctions et de résultats. Pourtant, nul n’était besoin d’explication pour comprendre que, par ce biais, le gouvernement frappait encore, non seulement, et honteusement le pouvoir d’achat du fonctionnaire, mais également la logique même du service public.
La mise en place de la « prime de fonctions et de résultats » PFR...

Dans le rapport sur l’avenir de la fonction publique, il est préconisé d’introduire dans le système de rémunération des fonctionnaires, une part revenant au mérite individuel de chacun d’eux. Un projet de décret, émanant du Premier ministre et un arrêté du Ministre du Budget fixant le cadre et les premiers « bénéficiaires » de cette prime à « la performance » sont déjà en préparation. La PFR s’appliquera d’abord, aux attachés puis aux administrateurs civils, puis aux chefs des services déconcentrés. Puis viendra le tour des agents de catégorie B... puis C.



Mais alors, qu’est ce que la PRF ?
C’est un dispositif indemnitaire qui comprend deux parts cumulables et modulables indépendamment l’une de l’autre par application de coefficients multiplicateurs à un taux de référence (exprimé en euros) :
 une part liée aux fonctions exercées, modulable de 1 à 6 pour tenir compte des responsabilités, du niveau d’expertise et des sujétions spéciales liées aux fonctions exercées. Cette part repose sur une typologie des postes (maillage large de 4 à 6 catégories par grade).
 une part liée aux résultats individuels, modulable de 0 à 6 pour tenir compte de la performance et de la manière de servir de l’agent. La modulation intègre, sur cette part, l’atteinte ou non par l’agent des objectifs qui lui ont été fixés.
Si le montant de la part fonctionnelle a vocation à rester relativement stable dans le temps, le montant de la part liée aux résultats individuels attribués à un agent est révisable en fonction des mérites et des résultats.
Que deviennent les indemnités existantes ?
La PFR se substitue à différentes indemnités interministérielles (IFTS, prime de rendement, IFR), ministérielles (indemnités d’exercice des missions des préfectures, indemnité de polyvalence), prime informatique, etc.... La NBI sera elle aussi intégrée à la PFR au sein de la part liée aux fonctions. Une mission d’inspection sera mandatée pour expertiser les conséquences de la perte de l’avantage retraite que la modulation entraînera. Passage des régimes indemnitaires actuels à la PFR : La DGAFP s’est engagé à faire inscrire dans la circulaire d’application qu’un agent ne pourra pas, l’année du passage sous le nouveau régime PFR, percevoir moins d’indemnité que l’année antérieure (comprenez qu’après : oui ! ).

... C’est la négation même du service public et de la fonction publique
Si, pour la DGAFP, le système présente l’avantage de simplifier le maquis des diverses primes versées et d’uniformiser le montant des indemnités versées en Centrale et dans les services déconcentrés, pour Solidaires, il s’agit là encore d’une attaque en règle contre la fonction publique et les fonctionnaires.
En instaurant un système de « concurrence » entre les fonctionnaires, en faisant de « l’entretien d’évaluation » un élément clef de leur rémunération, en individualisant le montant des primes selon le mérite et « la performance de chacun » l’administration entend gérer ses services et ses agents comme le fait toute entreprise privée.
Pour Solidaires, la finalité des missions de l’Etat ne peut être comparée à celle d’une entreprise privée qui a pour indicateur unique « le profit ».
Encore une fois le gouvernement oublie trop vite que les fonctionnaires sont au service de l’intérêt général et non au service d’intérêts particuliers. Ce faisant, il les rend plus vulnérables dans un contexte qui deviendra plus clientéliste, plus sensible aux pressions administratives, politiques ou économiques.
S’ajoutant aux milliers de suppressions d’emplois, cette réforme va encore faire illusion aux yeux de l’opinion publique, et même aux yeux d’une minorité de fonctionnaires pour qui « la culture du résultat » paraît être un bon principe. Pourtant chacun doit savoir que les « indicateurs » se trafiquent et que les résultats peuvent êtres aussi manipulés.
Ainsi, comment sera jugé et rémunéré au mérite un agent d’un service public quelconque qui consacrera le temps nécessaire à l’accueil des usagers ? Comment sera jugé et rémunéré un policier qui n’aura pas assez rédigé de contraventions dans sa journée ? Comment sera jugé et rémunéré un agent des impôts qui aura consacré beaucoup de temps à expliquer à des contribuables les méandres de la fiscalité ? Comment sera jugée et rémunérée une infirmière qui se sera attardée aux chevets des malades ?
Absurde, le fonctionnaire ne devra plus faire du travail intelligent, mais du chiffre. La conscience professionnelle, dont il fait preuve généralement, ne sera plus payée de retour et il devra cantonner ses activités à celles qui sont censées rapporter. Mais il faudra lui expliquer lesquelles !

Pour Solidaires, indépendance et responsabilité du fonctionnaire impliquent qu’il remplisse toutes ses missions de service public et pas seulement celles que certains décideurs auront jugées rentables. Et c’est justement parce que son travail a de tout temps été correctement effectué que l’administration, à défaut d’augmentation du point d’indice (en nombre et en valeur), a multiplié et complexifié les régimes indemnitaires.
Pour Solidaires, répondre à cette juste reconnaissance des compétences et qualifications des agents en instaurant une « prime de fonction et de résultats », censée simplifier le maquis des diverses primes versées, relève d’une ignorance totale de l’organisation de la fonction publique et de la spécificité de la fonction publique française.
Pour Solidaires, classer individuellement les fonctionnaires sur une échelle de Zéro à 6, entraînera inévitablement une compétition malsaine au sein des services, une perte de motivation et de confiance de la plupart d’entre eux.
Pour Solidaires, cette politique de conception libérale doit être combattue et le mérite intrinsèque de tous les fonctionnaires doit être reconnu !